Civil War Finlande, Royaume-Uni, Etats-Unis 2023 – 109min.

Critique du film

Les États-Ennemis d'Amérique

Christopher  Diekhaus
Critique du film: Christopher Diekhaus

En 2022, l’écrivain, scénariste et réalisateur britannique Alex Garland plongeait le public dans l’horreur burlesque de la masculinité toxique avec «Men». Aujourd’hui, il revient avec un nouveau coup de théâtre, «Civil War»: une vision inquiétante des États-Unis brisés par des tensions sociales.

Dans un avenir proche, les États-Unis d'Amérique sont divisés, ébranlés par une guerre civile. Au cœur des événements, la reporter-photographe Lee (Kirsten Dunst), accompagnée de ses collègues, Joel (Walter Moura) et Sammy (Stephen McKinley Henderson), et de la jeune Jessie (Cailee Spaeny), quitte New York pour Washington D.C. afin d’interviewer le président (Nick Offerman).

Dans «Civil War», le cinéaste met en scène une vision particulièrement dérangeante d’un potentiel futur. Les images présentées sont d’autant plus plausibles que le souvenir de la prise du Capitole en janvier 2021 et le spectre des prochaines élections présidentielles américaines hantent le projet d’un bout à l’autre. Dans son œuvre, Alex Garland n’explique aucunement les origines de cette situation, mais il laisse entendre que les prises de positions quasiment dictatoriales du président à l’écran, Nick Offerman, auraient poussé des états, comme la Californie et le Texas, à se révolter, marquant le début d’une guerre sans merci.

Si le titre laissait présager un grand spectacle d’1 h 40, il faudra surtout attendre les derniers instants du long métrage pour un final retentissant. Ainsi, «Civil War» prend surtout la forme d’un road-movie dystopique, rythmé de décors de fin du monde et de quelques inquiétantes rencontres, et interroge sur la moralité propre au reportage de guerre. Sous la plume d’Alex Garland, les protagonistes se transforment en pions d’un jeu explosif. Et, sans creuser le passé, ni interroger les origines de la crise, le cinéaste préfère suivre ses personnages au jour le jour.

(Adapté de l'allemand)

18.04.2024

3.5

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 6 mois

“American nightmare”

L’Amérique d’aujourd’hui est en proie à une guerre civile. Des États sécessionnistes tentent de renverser le gouvernement. Malgré les risques, Lee Smith, une photojournaliste renommée, et trois acolytes partent pour Washington dans l’espoir d’obtenir un entretien exclusif avec le président controversé.

Les USA sont plus désunis que jamais. Négligeant les détails explicatifs, Alex Garland évoque l’association incongrue entre le Texas et la Californie partant à l’assaut du Capitole aux mains d’un régime autoritaire dont on ne sait pas grand-chose. Le commandant en chef en est certes à son troisième mandat. Il a démantelé le FBI, bombardé des civils et visé les médias. Les New-Yorkais ont soif. L’électricité manque et le dollar s’effondre. Dans ce chaos politique bascule tout un pays.

Carrosseries abandonnées sur les voies d’accès, tentes pour camps de réfugiés, pilleurs pendus dans un tunnel de lavage, charniers à ciel ouvert. Dans ce voyage au bout de l’enfer, se maintiennent des bourgades hors du temps où promener son chien est encore possible… sous l’œil attentif de snipers. Les visions cauchemardesques, souvent impressionnantes, sont celles des films ou série d’anticipation qui ravissent les écrans. Sauf que l’ennemi n’est ni l’alien ni le zombie. Il vient d’ici, de l’intérieur : « Quel genre d’Américains êtes-vous ? » devient une question de vie ou de mort.

Témoins privilégiés en cette apocalypse, les reporters sont avides d’informer. Quatrième pouvoir, ils quêtent le scoop et la photo parfaite. Dans la voiture estampillée « Presse », les générations se côtoient, alliant la sagesse de l’aîné à l’immaturité de la jeunesse. Au milieu, Lee perd petit à petit foi en son métier, quand son binôme Joël ne bande que pour l’action. Dans la nuit noire, les étoiles filantes des roquettes lumineuses sont pour lui la promesse d’un feu d’artifice. Les caractères stéréotypés manquent de chair et peinent à susciter de l’empathie. Que l’on appuie sur le bouton d’une caméra, d’un appareil, ou sur la gâchette d’une arme, le mot anglais reste le même : « shoot ».

Demeure l’effroi ressenti face à cette violence crue, réaliste et directe, sans sommation aucune. La chute de la Maison blanche devient traque à la Ben Laden. L’on sursaute à chaque impact prévoyant le passage de relais final d’une froideur extrême. Un goût de sang acide agite l’estomac pour atteindre la gorge. La fiction annonce souvent le pire. Espérons qu’en cette année électorale, elle puisse se tromper.

(6.5/10)Voir plus

Dernière modification il y a 6 mois


vincenzobino

il y a 7 mois

4.25: War Machina
New-York : Ellie est reporter photo de guerre et le moins que l’on puisse dire est qu’elle est servie : sa patrie américaine est le théâtre du conflit après que des confédères de l’Ouest désirent renverser le président actuel ayant provoqué un véritable chaos politique. Secondée par Joel véritable casse-cou souhaitant photographier le président, Sammy doyen et ancien reporter de guerre assagi, la photographe cherche à se rendre à Washington mais doit composer avec une passagère pas si clandestine : Jessie une jeune fille de 23 ans dont Ellie est l’idole. Une expédition périlleuse.
Le voici ce nouveau délire d’Alex Garland spécialiste des lives-actions fabulateurs mais pas trop. Il s’inspire pour son nouvel opus de la tentative d’un ancien véritable président de contester le pouvoir. Avec fracas efficace.
Un premier plan nous « plongeant » tout de suite dans le bain rouge de la révolution : le décor est planté et il va tantôt faire sourire mais surtout effrayer par une certaine paranoïa semblant être passée par la tête du réalisateur. Sauf qu’il n’est sur un plan d’éducation politique sans doute pas si loin de la réalité.
Et en cette année électorale ce patchwork en soi sonne inéluctablement comme une alerte rouge où notamment la presse pour survivre sur un plan professionnel serait contrainte de filmer des survivants mais surtout leurs victimes. Et en y réfléchissant cette constatation sanglante fait froid dans le dos. Mais la force principale du film est cet hommage assumé à la machine de guerre féminine où chaque femme ayant un rôle à jouer va être confrontée tant à de vieux démons qu’à une prise de conscience de la capacité ou pas à survivre à cet entourage hostile. Et Kirsten Dunst particulièrement impressionnante de même que l’excellente Caillie Speny illustrent qu’une machine peut parfois tomber en panne mais être réparée.
On sera peut-être craintif sur le rythme plutôt lent du premier quart, mais totalement rassuré par la dernière demi-heure sans temps mort pour explorer cette folie humaine.
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