Silvio et les autres France, Italie 2018 – 150min.

Critique du film

One-man-show berlusconesque

Sven Papaux
Critique du film: Sven Papaux

Dans le viseur du grand Paolo Sorrentino, il y a eu un pape loin des standards habituels dans The Young Pope. La jeunesse prenait le pouvoir à travers le narcissisme et le culot dégoulinant de Jude Law dans la peau d’un cardinal controversé. Alors que dire de Silvio et les autres, qui s’intéresse à l’icône italienne Silvio Berlusconi. Populaire pour ses frasques, sa position de président de l’AC Milan, ses soirées « Bunga Bunga » et son amour immodéré pour les femmes. Un one-man-show berlusconesque, érotique, comique et satirique !

Un homme qui a fasciné l’Italie, qui l’a aussi épuisée. Une figure politique unique. Berlusconi est sulfureux mais il est avant tout un entrepreneur malicieux, adulé ou détesté; voici le nouveau sujet du film de Paolo Sorrentino. Le réalisateur italien en parle grâce à la poésie des plans, des travellings méticuleusement intégrés, des choix de lumière et le film se pare d’une esthétique à couper le souffle. Le passé de publicitaire de Paolo Sorrentino est intacte et il est tout aussi méticuleux quand il s’agit de développer un caractère tel que Berlusconi. La légende « Il Dottore », incarnée par l’excellent Toni Servillo est digne d’une figure moderne de Gatsby le Magnifique.

Berlusconi n’apparaît pas directement. Silvio et les autres s’axe en premier sur Sergio Morra (très bon rôle de Riccardo Scamarcio), un entrepreneur originaire des Pouilles accroc à la cocaïne et souhaitant par tous les moyens s’approcher de « Lui ». Celle qui exaucera son voeu sera Kira (Kasia Smutniak), une privilégiée du politicien. Les deux vont commencer à élaborer une tactique pour attirer l’attention du vénérable politicien.

Place aux soirées « Bunga Bunga », où la démesure est à son paroxysme. Berlusconi est un être à part, lui qui refuse de vieillir, sa hantise numéro une, se cache derrière un grand sourire aussi faux que troublant. Tout est question de challenge pour Berlusconi. De sa relation tortueuse avec sa femme, Veronica Lario (Elena Sofia Ricci), à son retour sur le devant de la scène politique transalpine, en achetant six sénateurs, il est animé d’une soif de pouvoir. Excellent orateur et narcissique, l’homme est à l’image de ce vieillard qui se bat coûte que coûte pour rester à la page.

Mais à force de réfléchir comme Berlusconi, Paolo Sorrentino en perd (un peu) son latin et sombre dans une certaine vulgarité dans la première partie et ce malgré la maîtrise plastique. Mais débarrassé des séquences érotiques superflues, nous retrouvons le portrait d’un être en fin de cycle, tentant désespérément de tromper le temps pour enfin toucher le fond peu à peu.

En bref !

Film fleuve, qui rappelons était prévu en deux parties avant de devenir une unique version de 2h30, porte les séquelles du métrage excessif. L’équilibre trouvé dans La Grande Bellezza ou Youth n’est pas celui de Silvio et les autres. Mais même si inégal et imparfait, la patte inégalable du metteur en scène transalpin réussit tout de même à proposer un instant précieux.

20.02.2024

3.5

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Commentaires

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CineFiliK

il y a 6 ans

« Le vieux pape »

Sergio n’est qu’un fils à papa qui souhaite briller au plus vite dans les hautes sphères politiques européennes. Son dieu, c’est Lui, qu’il tente d’approcher à tout prix : Silvio Berlusconi.

Un mouton entre dans une villa luxueuse. La télé allumée diffuse un quiz sans profondeur qu’une potiche souriante au côté d’un vieillard s’efforce de réanimer. La climatisation s’affole et pétrifie l’animal qui, dans sa laine blanche, finit par mourir de froid. Symbole appuyé du citoyen italien face à la puissance médiatique berlusconnienne ?

Après Nanni Moretti, c’est au tour de Sorrentino de s’attaquer au mythe du Caïman. Moins corrosif qu’attendu ou espéré, son portrait décrit un homme qui a réussi en politique en faisant croire et vendant du rêve. Autour de lui, « eux » papillonnent, attirés par la lumière de ce projecteur au sourire aveuglant. Mais aujourd’hui, l’icône n’est qu’un clown pathétique, un volcan éteint. Il a l’haleine d’un grand-père, chargée par les promesses qu’il n’a su tenir.

Fallait-il près de 3 heures pour nous raconter si peu ? Le divin laisse le plus souvent place au vide échappé de ces soirées « bunga-bunga » qui n’en finissent pas. La grande beauté se fait discrète pour n’éclater que dans une dispute conjugale ou la déposition du Christ de l’Aquila. Métaphores d’une Italie en ruines.

5.5/10Voir plus

Dernière modification il y a 6 ans


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